J’aime les femmes. Toutes les femmes. Mais quand, en plus d’être femmes (ce qui n’est déjà pas simple en soi), elles sont artistes, alors là…
Je suis allée jusqu’à Gand pour rencontrer Julie Margaret Cameron. Jusqu’à Vienne, pour Lee Miller. A Paris, pour Niki de Saint Phalle. Jusqu’à Mexico City, pour Frida Kahlo et sa Casa Azul.
C’est à Bruxelles que je rencontrai Evelyne Axell.
Le coup de foudre eut lieu au 6, Place Royale. ING Art Center. Salle « Roaring sixties. Violence, War & Protest ». Proche des Electric Chairs d’Andy Warhol (1965), une oeuvre attire mon attention : Evelyne Axell, Autostop. 1965.
« Evelyne Axell a perdu la vie en 1972 à la suite d’un accident de voiture. On pourrait croire qu’elle pressentait inconsciemment son destin, quand elle a fait cet Autostop en 1965. Axell peint une Vénus casquée, couchée sur un lit et contemplant un coucher de soleil flamboyant auquel mène une route noire comme jais, rythmée par une ligne en pointillé blanc. Une analyse a révélé qu’un dessin se trouvait sous la peinture noire de la route : celui d’une voiture fonçant tous phares allumés en direction de la Vénus couchée. L’accident ultérieur donne à cette oeuvre un caractère dramatique. »

Evelyne Axell est décédée en 1972, l’année qui a précédé ma naissance. Tout le monde s’en fout. Mais moi, ça me parle !
Elle est Belge. Née à Namur. Formée à la céramique à l’Ecole des Beaux-Arts de Namur puis à la comédie au Conservatoire d’Art Dramatique de Bruxelles. Une carrière de comédienne, une expérience comme speakerine à la télévision. En 1963, BAM !, elle plaque tout pour se consacrer à la peinture.
Son mari n’est autre que Jean Antoine, un réalisateur formé à Paris qui réalise des documentaires sur l’art pour la télévision belge. Celui-là même qui contribuera à faire connaitre le Pop Art au public européen par le biais de documentaires exceptionnels dont « Métamorphoses : Dieu est-il pop ? » et « Les Années pop ».
C’est grâce à lui qu’elle rencontre René Magritte. Elle devient en 1963 son (unique) élève. Il l’initie à la peinture à l’huile. Technique à laquelle elle renoncera par la suite pour se tourner vers des matériaux nouveaux, plus en adéquation avec son temps : le plexiglas, le formica, l’émail pour voiture, … Evelyne Axell devient « Axell, La Vénus aux plastiques ».
Alors que la plupart des artistes belges restent marqués par l’abstraction, Evelyne Axell est l’une des premières à se lancer dans la figuration Pop. Les couleurs projetées sont vives, fluos, psychédéliques. Son approche des matériaux est moderne et expérimentale. Collages composites, peinture fluo en bombe (comme sous-couche pour plus de luminosité), fourrure synthétique, la dynamique est définitivement Pop !
Les hommes… Il y en a peu dans l’oeuvre d’Evelyne Axell. Et pourtant, ils ont compté. Enormément même : Jean Devaux, l’oncle d’Amérique, inspirateur de ses rêves et de sa vocation ; Jean Antoine ; René Magritte ; son fils, Philippe… Mais c’est des femmes dont traite principalement l’oeuvre d’Axell. Des femmes, de la féminité, de la sensualité. Une oeuvre charnelle (érotique ?), résolument provoquante, en résonance avec son époque ; celle de la libération des moeurs, des carcans de pensée, des corps et des tabous.
Elle était libre, Axell. Libre et courageuse. Courageuse d’évoluer dans un monde de mecs et d’y affirmer sa féminité, sa sensualité, son hédonisme. A sa manière, elle a lutté pour l’indépendance de la femme. Pied de nez au machisme artistique ambiant, elle est devenue l’une des leurs.
« Il y a avait une jolie chaussure jaune sur l’amoncellement de ferrailles dans lequel ses rêves s’étaient évanouis. » (Jean Antoine)
De son vivant, Evelyne Axell n’a jamais rencontré Warhol. Il l’aurait aimée, assurément.
Site Web : http://www.evelyne-axell.info/fra/
Fan page : https://www.facebook.com/Evelyne.Axell
Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Evelyne_Axell
Expo : Pop Impact Women Artists à la Maison de la Culture de la Province de Namur, jusqu’au 14 février

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